Le 20 janvier…, le jour de la “migration” depuis “X” !
La plateforme “X” fait face à un grand défi, représenté par la montée des vagues de rejet de la part des politiciens, des institutions médiatiques et des organisations de défense des droits de l’homme, qui la considèrent comme une source de diffusion de désinformation et de discours de haine.
La décision de grands journaux tels que “The Guardian” britannique et “La Vanguardia” espagnole, ainsi que précédemment “Mediapart” et “OuestFrance” français, de quitter la plateforme, suivie par le départ de politiciens influents, reflète une crise profonde sur la manière dont cette plateforme numérique est gérée sous la politique de son propriétaire Elon Musk, qui soutient ouvertement les thèses de l’extrême droite et qui s’est renforcé après l’arrivée de Donald Trump à la présidence des ÉtatsUnis.
Cela se produit alors que le continent africain reste le grand absent de ce conflit, bien qu’il compte des millions de créateurs de contenu qui alimentent ces plateformes sans en tirer aucun bénéfice significatif.
Départ des grands journaux
Le départ de grands journaux tels que “The Guardian” britannique et “La Vanguardia” espagnole de la plateforme “X”, anciennement connue sous le nom de Twitter, suscite un large débat sur le rôle des plateformes numériques dans la promotion de la transparence et la protection de l’information journalistique.
Les deux journaux ont décrit le réseau détenu par Elon Musk comme une “plateforme médiatique toxique” qui contribue à la diffusion de “fausses informations”.
Selon Vincent Berthier, responsable du département technologie chez Reporters sans frontières (RSF), cette démarche reflète une crise plus profonde liée à l’incapacité des gouvernements à imposer une régulation efficace des plateformes numériques.
Berthier a déclaré à l’AFP que l’absence de régulation transforme ces plateformes en “environnements malsains et non sécurisés pour l’échange d’informations journalistiques”.
Il a également souligné qu’Elon Musk, connu pour son soutien à Donald Trump et ses positions controversées, incarne “une face extrême du cauchemar informationnel” sur ces plateformes, bien que le problème ne se limite pas à Musk, mais concerne une crise générale dans la gestion des plateformes numériques.
En réponse à ces développements, RSF a annoncé avoir déposé une plainte en France contre “X”, accusant la plateforme de diffuser de fausses informations et des allégations mensongères, notamment des accusations attribuées à l’ONG concernant une étude sur des “tendances nazies” parmi des soldats ukrainiens.
Les politiciens de gauche quittent la plateforme
Depuis qu’Elon Musk a pris le contrôle de Twitter, désormais “X”, les critiques se sont multipliées, affirmant que la plateforme est devenue un espace non modéré, favorisant la désinformation et les discours incitant à la haine.
Cela a conduit à une vague de départs parmi les politiciens de gauche en Suisse, où de nombreux parlementaires des partis socialistes et écologiste ont fermé leurs comptes ou ont cessé d’utiliser la plateforme.
Parmi ces départs, l’expérience du député de gauche Cédric Wermuth illustre les difficultés de transition vers des plateformes alternatives comme “Bluesky”, où son nombre d’abonnés a chuté drastiquement de 64 300 sur “X” à seulement 2 300 sur la nouvelle plateforme.
Cependant, de nombreux politiciens ayant quitté “X” estiment que leur décision reflète leur rejet d’un environnement jugé nuisible et antidémocratique.
Pour certains, “X” est une plateforme conçue pour servir les courants d’extrême droite. La députée socialiste Branda Tosto exprime son mécontentement en décrivant la plateforme comme un “réseau conçu pour servir les agendas de l’extrême droite”.
Toutefois, d’autres estiment que ces départs risquent d’aggraver le problème, car l’absence des voix de gauche pourrait rendre la plateforme encore plus radicale, la transformant en un outil de propagande au service de figures politiques telles que Donald Trump, le parti “Alternative pour l’Allemagne” et le “Rassemblement National” en France.
Malgré les divergences politiques sur la meilleure façon de gérer la présence sur la plateforme, des voix de droite appellent à ne pas l’abandonner.
Le député Nicolas Coudray, du parti “Union démocratique fédérale”, estime que les politiciens opposés aux politiques de la plateforme devraient y rester pour offrir un contrediscours à la domination croissante de l’extrême droite.
Dans ce contexte, la ministre suisse de la Justice, Karin KellerSutter, a ouvert un nouveau compte sur “X” pour assurer sa communication pendant sa présidence. Cette initiative a été saluée par la droite mais critiquée par la gauche, qui y voit une légitimation de la plateforme à un moment où elle devrait être soumise à une régulation stricte.
Le Conseil fédéral suisse prévoit de publier prochainement un projet de loi visant à réglementer les réseaux sociaux dans le pays, une démarche qui pourrait avoir un impact significatif non seulement en Suisse, mais aussi dans l’ensemble de l’Europe.
Une politique qui incite à quitter “X”
En France, Sandrine Rousseau, députée écologiste et membre influente de la “Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale” (NUPES), a suscité une vive controverse en appelant ouvertement ses collègues députés à quitter la plateforme “X”, dirigée par Elon Musk.
Dans une lettre adressée à 191 députés de son parti, Rousseau a demandé un départ collectif de la plateforme en guise de protestation contre ce qu’elle décrit comme une “menace réelle que représente la gestion de Musk pour nos démocraties”.
Fait intéressant, cet appel a été publié sur “X” luimême.
Rousseau a qualifié la plateforme de “machine à désinformation” et de “chambre d’écho pour les discours d’extrême droite”, affirmant que le maintien des députés sur la plateforme reviendrait à cautionner implicitement les changements qui y ont été opérés sous la direction de Musk.
Elle a exhorté ses collègues à s’unir et à envoyer un message de protestation collectif, leur demandant de répondre à son initiative.
Cependant, cette proposition rencontre une certaine résistance au sein de la NUPES.
Le député Éric Coquerel, du parti “La France Insoumise”, a déclaré qu’il préférait rester sur “X” pour le moment, estimant qu’il y a un “problème réel” lié à “l’extrême droite qui domine les espaces politiques et médiatiques à l’échelle mondiale”.
Des associations rejoignent le mouvement
La situation continue de se détériorer pour la plateforme, après que 87 associations françaises, dont des organisations de premier plan telles que la “Ligue des droits de l’homme” et l’association caritative “Emmaüs”, ont annoncé leur retrait de “X”, qualifiant la plateforme de “grave menace” pour la démocratie et la liberté d’expression.
Cette décision, qui entrera en vigueur le 20 janvier 2025, a été annoncée dans un communiqué commun publié mercredi dernier, dans lequel les associations ont exprimé leurs préoccupations quant à la prolifération des discours haineux et des fausses informations sur la plateforme.
Elles ont déclaré que leur retrait constitue un sacrifice d’un canal de communication important, mais ont souligné que continuer à utiliser “X” reviendrait à accepter implicitement les transformations qui ont rendu la plateforme “non sécurisée pour la liberté d’expression et la dignité des individus”.
Parmi les institutions ayant pris des mesures similaires en France, on trouve 38 hôpitaux relevant de l’administration de “l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris”.
À l’échelle européenne, plus de soixante universités en Allemagne et en Autriche ont également annoncé leur retrait de “X”, mettant en garde contre les transformations qu’elles qualifient “d’antidémocratiques”.
Une application pour faciliter la migration vers “Bluesky”
“HelloQuitteX” est une nouvelle application développée par des chercheurs français du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) pour aider les utilisateurs à quitter “X” de manière fluide et organisée.
L’application a été lancée en réponse aux critiques croissantes contre la plateforme depuis qu’Elon Musk en a pris le contrôle en 2022, l’accusant de promouvoir du contenu trompeur et de ne pas faire assez pour lutter contre les discours haineux.
L’application encourage les utilisateurs à choisir le 20 janvier, date de l’investiture de Donald Trump, comme symbole de leur migration numérique collective.
Elle permet aux utilisateurs de transférer leurs abonnés et leurs abonnements vers d’autres plateformes comme “Bluesky” et “Mastodon”, considérées comme plus respectueuses de la vie privée et de la liberté d’expression.
L’objectif de l’application est de répondre aux inquiétudes des utilisateurs quant à la perte de leur audience et de leurs ressources en quittant la plateforme. Les utilisateurs peuvent télécharger leur archive personnelle de “X” sur le site de l’application, qui garantit la suppression de toutes les données après le transfert.
L’application a suscité un engouement considérable, avec plus de 5 000 utilisateurs et organisations enregistrés en une semaine seulement. Parmi les entités qui ont récemment annoncé leur retrait figurent l’Institut Pasteur et plus de 80 associations, y compris la Ligue des droits de l’homme et Emmaüs France.
Des personnalités publiques, telles que l’astrophysicien Éric Lagadec et des organisations environnementales, ont également rejoint la campagne ” HelloQuitteX “, utilisant un message automatique pour annoncer leur départ.
David Chavalarias, mathématicien à l’origine du projet, affirme que la plateforme “X” est devenue un environnement dangereux pour les individus et la démocratie.
Il souligne que le contenu extrémiste a considérablement augmenté depuis l’acquisition par Musk, transformant la plateforme en un lieu de polarisation politique et idéologique.
Selon lui, l’exode de “X” pourrait n’être que le début, suggérant que d’autres plateformes, telles que Facebook, pourraient connaître un sort similaire si elles continuent à réduire leurs politiques de modération et à encourager des idéologies extrémistes.
Ces évolutions pourraient entraîner des changements fondamentaux dans le paysage numérique mondial, avec des appels croissants à une réglementation plus stricte de ces plateformes pour garantir un environnement en ligne plus sûr et plus respectueux de la démocratie.
Quand l’Afrique se réveilleratelle ?
À un moment où les efforts s’intensifient en Europe et en Chine pour réglementer les plateformes de réseaux sociaux, afin de protéger la sécurité nationale et d’assurer une équité dans les bénéfices, l’Afrique semble en retard dans ce domaine malgré ses immenses potentialités.
L’Afrique qui compte plus d’un milliard d’habitants, représente un vaste marché pour les plateformes de réseaux sociaux qui réalisent d’énormes profits grâce à l’activité des utilisateurs africains, alors que cela ne profite pas concrètement aux communautés locales ou aux économies nationales.
Des plateformes comme Facebook, X et Instagram exploitent les données des utilisateurs africains et génèrent d’énormes profits grâce aux publicités ciblant un public dont l’utilisation d’Internet augmente jour après jour. Cependant, alors que la presse écrite en Afrique est menacée de disparition en raison du manque de ressources et des transformations numériques, ces plateformes engrangent des milliards de dollars grâce au contenu publié gratuitement.
Cet écart dans le partage des bénéfices soulève de grandes questions sur le rôle de la Commission africaine dans la gestion de cette situation. Alors que l’Union européenne a adopté des lois telles que la “Loi sur les services numériques”, qui impose des responsabilités aux grandes plateformes pour protéger les données des utilisateurs et promouvoir la transparence, l’Afrique n’a pas encore suivi cette voie.
Des experts estiment qu’il est impératif pour la Commission africaine de prendre des mesures sérieuses pour réglementer l’utilisation des plateformes numériques. L’Union africaine doit adopter des politiques incitant les grandes plateformes à contribuer au développement de l’économie numérique du continent.
Cela pourrait inclure l’imposition de taxes équitables sur les bénéfices générés par ces plateformes grâce aux publicités sur les marchés africains, permettant ainsi de financer des projets médiatiques numériques et de soutenir la presse locale.
En outre, des plans clairs doivent être mis en place pour développer l’infrastructure numérique en Afrique, afin de rendre Internet plus accessible aux utilisateurs du continent tout en garantissant la protection des données personnelles.